Avide de lumière, de chaleur, désencombré des pelures de lainage, les pieds allèges et allègres libérés du poids des bottes, une mission nous appelle.
Inspecter la grève. Quelle forme, densité, composition, a pris la laisse de mer du printemps? De quel espace s’est-elle emparée?
La neige, la glace, les marées, le vent, le verglas, la pluie, la fonte. L’action commence dans les rivières. Tout est charrié, brassé, accueilli par le fleuve, puis, déposé. Des indices de ces mouvements et tourments trônent sur la grève.
Jusqu’à l’orée du petit bois, jusqu’au pied des rosiers dont les racines ont été lessivées par la mer, apparait une montagne de joncs. Des rouleaux de joncs, entremêlés de plastique, douilles, styrofoam, sandales, jouets de plage, bouteilles, bouchons, embouts. Surmontés de billots, restes de quais, débris de construction. On soupçonne que des crânes, plumes, os s’y trouvent. On les devine.
Tapis humide, spongieux, des insectes y pullulent. La laisse est un lieu de vie débordant, attirant les passereaux vifs en vol, les merles et les bruands en marche. Bientôt apparaissent les épinards de mer. Perplexité. Comment croître dans ce tapis? Avec quelles racines? À quelle profondeur? Ils tiendront là tout l’été. Sauf ceux qui seront balayés par une grosse marée.
Pas qu’un gros paquet de déchets, la récolte des bassins versants.